vendredi 29 novembre 2013

30 jours, 1 chanson par jour

Jour 5: Justice


Album: All Access Arenas
Sortie: 6 mai 2013
Étiquette: Ed Bagner Records


Après la sortie du révolutionnaire Cross en 2007, le duo français avait fait paraître un album en concert pour la tournée A Cross the Universe. Ils récidivent cette année après la parution de Audio, Video, Disco, un album beaucoup moins bien reçu que le précédent, avec la couverture de leur tournée All Access Arenas. Deux albums studio suivis de deux albums en concert; était-ce vraiment nécessaire demanderez-vous peut-être? Ce qu’il faut comprendre avec Justice, c’est que c’est un des rares groupes d’électro qui interprète réellement leur musique plutôt que de simplement jouer avec les pièces déjà construites. Ils doivent donc gérer des dizaines d’échantillons, souvent simultanément, afin de recréer les rythmes endiablés sur lesquels la foule se démène comme s’il n’y avait pas de lendemains. De plus, Justice ne fait pas que recréer ce qui se trouve sur l’album. Le groupe s’amuse allègement à modifier et entrelacer les pièces pour s’adapter au public et créer une atmosphère survoltée. D’ailleurs, si vous n’avez jamais assisté à Justice en concert (pas un Dj-Set, un vrai concert), il vous manque sans doute une importante notion dans la définition de “foule déchaînée”. J’ai assisté au spectacle de leur tournée All Access Arenas lors de leur passage à Montréal et je n’avais jamais vu une foule maintenant un enthousiasme à 15 sur une échelle de 1 à 10 pendant toute la durée d’un concert. Justice en concert, c’est comme se brancher sur le 240 volts en s’envoyant des Red Bull. C’est incroyable et le groupe sait exactement comment faire perdre la tête à leur public. Cet album est donc nécessaire, mais ne rend pas vraiment justice (jeu de mots non intentionnel) à quoi l'on pourrait s’attendre du groupe en prestation.

Pour cette tournée, Justice adopte un style plus rock afin de rester dans la lignée de Audio, Video, Disco qui se voulait un véritable hommage au rock des années 70. Le groupe laisse donc les clavecins et les violons de Cross pour quelque chose de plus brut, de moins subtile, adoptant une attitude de concert d’arène comme le prédit le nom de l’album. Tout comme Daft Punk avec Alive 2007, Justice entrelace plusieurs pièces afin de créer quelque chose de nouveau et de surprenant pour une foule gourmande qui attend que les hits s’enchaînent. Le résultat n’est pas toujours aussi réussi qu’on l’espérerait, surtout en première partie où le groupe surutilisise les échantillonnages de Civilisation, leur premier extrait qui avait créé tout un buzz à la suite d’une publicité de Addidas. Cela ne prend toutefois pas trop de temps avant que Justice élève le niveau de créativité d’un cran et dès Canon/D.A.N.C.E. le groupe nous tient en haleine jusqu’à la fin. Autant Audio, Video, Disco avait une structure de rock classique, autant All Access Arenas s’amuse à envoyer des montées en accélérée afin d’augmenter la pression jusqu’au seuil critique pour finalement laisser tomber un “drop the beat” typiquement électro, donnant du coup, une autre raison à la foule d’éclater de joie. La réinterprétation de Horsepower suivit de New Lands et Stress est incroyablement efficace. Si vous vous entraînez et que vous sentez que votre motivation vous lâche, cet enchaînement est un remède inespéré. 

En écoute pour vous: L’album intégral sur YouTube, gracieuseté du groupe lui-même!

vendredi 22 novembre 2013

30 jours, 1 chanson par jour

Jour 4: Russian Circles


Album: Memorial
Sortie: octobre 2013
Étiquette: Sargent House


Le plus grand défi lorsqu’on fait de la musique instrumentale est, je crois, d’arriver à faire évoluer chacune des pièces de manière continue, de susciter l’intérêt de l’auditeur, d’avoir assez de contenu musical pour justifier l’absence de paroles. Avec Memorial, Russian Circles s’impose comme des maîtres de la narration instrumentale. L’univers imaginé par le groupe est sombre, certes, mais possède une rare intensité que peu de groupes parviennent à exprimer sans passer par une violence extrême misant ainsi sur l’illusion de leur mise en scène pour nous happer dans un tourbillon agressant. Ici Russian Circles nous démontre qu’il est possible d’arriver à un résultat encore plus enivrant en usant de sensibilité et d’intelligence. Le génie du groupe est tel que je n’arrive toujours pas à croire qu’il n’est formé que d'un trio. Russian Circles nous transporte dans cet univers riche et soigneusement composé où s'entremêlent à la douceur des mélodies, des pointes de puissance métal épique aux allures d’épopée. 

Le groupe narre habilement ce qui pourrait être un conte à la mémoire d’un événement tragique ou encore d’un personnage influent. Ils parviennent à transformer constamment l’atmosphère dans laquelle ils nous enveloppent, recourant tantôt à des mélodies acoustiques apaisantes, puis en insufflant une puissante dose d’énergie à leur musique grâce aux guitares résonnants au loin et une batterie mise de l’avant qui étonne par son imagination rythmique. On a souvent l’impression d’être en présence d’un véritable orchestre tant le groupe parvient à occuper brillamment l’espace fréquentiel. Au-delà du talent indéniable de Russian Circles, l’album Memorial transporte l’auditeur, le fait voyager et le fait vibrer émotionnellement. Nul besoin d’ajouter une voix à leur musique; celle-ci parle pour elle-même. Ma seule déception dans tout cela est qu’au bout de seulement 37 minutes, il nous faut revenir à la réalité.

En écoute pour vous: 1777


mercredi 20 novembre 2013

30 jours, 1 chanson par jour

Jour 3: Hôtel Morphée


Album: Des histoires de fantômes
Sortie: février 2013
Étiquette: Audiogram

Je n’ai jamais eu un grand intérêt pour la musique québécoise. Je l’ai toujours trouvée trop calquée sur la chanson française ou qu’elle s’exprimait en caricature folklorique. Il y a évidement eu des exceptions au passage et plus jeune j’ai adoré l’époque du Dôme et des Fourmis de Jean Leloup (albums qui ont très mal vieillis soit dit en passant!), les éternels laissés pour compte Grim Skunk, les talentueux Groovy Advaark et certainement d’autres que j’oublis au fil du temps. Des années se sont écoulées avant que je ne m’intéresse à nouveau à ce qui se fait ici. Il a surtout fallu que de jeunes musiciens remuent la cage contraignante du terroir, se libérant des conventions de l’Adisq et sèment une idée dans l’air du temps; que l’on pouvait aspirer à faire autre chose tout en restant authentique. Reste que tout cela est basé sur mes connaissances personnelles et que si j’avais passé les dernières années branché sur CISM, j’aurais probablement un tout autre discours. Je tenterais l’expérience pour ma revue 2014!

Bien que l’Adisq soit une honte nationale, j’ai découvert Hôtel Morphée grâce aux nommés de L’autre Gala. Ce groupe s’inscrit parfaitement au renouveau dont je parle et évolue dans un courant parallèle, donc assez différent, des groupes folk qui connaissent présentement un immense succès (Avec pas d’casque, Soeurs Boulay, Lisa Leblanc, etc.). Hôtel Morphée est plutôt un héritier de groupes comme Karkwa et font dans une pop planante et poétique parsemée subtilement d’électro. Hôtel Morphée évolue dans une mélancolie douce et explore la beauté poétique de cet état d'âme déchiré entre douceur et souffrance (que Peter Peter a si magnifiquement qualifié de Version améliorée de la tristesse). Cette émotion à fleur de peau est accentuée par des violons discordants et grinçants, ces guitares qui naviguent d’un ton à l’autre et la voix de Laurence Nerbonne qui résonne en écho, s'enchevêtrant habilement dans un chaos calculé et esthétique au rythme des percussions qui courent afin de rattraper le temps perdu.

Malgré tout, j’ai l’impression d’avoir déjà entendu ce son mille et une fois déjà. C’est sans doute parce que ce courant est devenu, justement, chose courante, dans l’univers musical québécois et que les Louis-Jean Cormier, Half Moon Run, Patrick Watson et maintenant Hôtel Morphée, pour ne nommer que ceux-là, semblent tous issus de la même école, partageant la même muse créatrice, suivant les enseignements des membres de Radiohead. Je reconnais dans cette musique, plusieurs des manies du groupe britannique que se sont approprié les groupes d'ici, folklorisant le tout, créant ainsi un son particulièrement savoureux. Cela donne toutefois l'impression d'écouter des artistes qui partagent le même univers, les mêmes émotions, la même vision. Ce n'est pourtant pas nécessairement une mauvaise chose puisque leur musique parcourt le monde entier et séduit au passage des milliers d’adeptes. Je trouve cela même encourageant pour la suite des choses; ces musiciens talentueux ont tout ce qu’il faut pour quitter les sentiers battus et explorer davantage, prendre des risques créatifs et devenir les architectes d’une nouvelle époque culturelle.

La pièce titre en écoute pour vous!

dimanche 17 novembre 2013

30 jours, 1 chanson par jour

Jour 2: How to Destroy Angels


Album: Welcome Oblivion
Sortie: mars 2013

Étiquette: Colombia Records


Probablement un des pires noms de groupe de l’histoire! Ce projet est composé de Trent Reznor (Nine Inch Nails), Atticus Ross (tous deux gagnants d’un Oscar pour la meilleure trame sonore originale pour The Social Network ainsi qu’un Grammy pour leur travail musical pour le film The Girl with the Dragon Tatoo), Mariqueen Maanding qui s’avère être aussi la femme de Reznor et Rob Sheridan (aussi directeur artistique de l’album et de NIN). Il est donc facile de constater que la formation est tissée autour de Trent Reznor et d’un univers qui lui est propre. Si vous avez cessé de suivre l’évolution de Nine Inch Nails après Downward Spiral, il y a de fortes chances que vous ne trouviez pas de lien trop évident avec HtDA. Il vous faudra alors faire un peu de rattrapage et faire l’écoute du projet instrumental Ghost I-IV ainsi que l’album The Slip (album gracieusement offert par le groupe) afin de saisir la direction empruntée par Reznor depuis les dernières années. 

Ceci étant dit, HtDA ne s’éloigne pas tellement de ce son, ou plutôt, de ces sons développés par Reznor au cours de sa fructueuse carrière. Les compositions sont typiquement construites de la même façon; superposant à la fois rythmes et mélodies indépendantes, créant ainsi une trame riche et surprenante. Ce qui distingue HtDA à NIN provient certainement du fait que le groupe est formé d’une bande de geeks! Ils ont tous des connaissances techniques approfondies, sont tous friands de technologie et cela paraît grandement. Chaque son, aussi subtil soit-il, est travaillé et étudié avec soin, ne laissant rien au hasard dotant Welcome Oblivion d’une qualité de production exceptionnelle. Faire l’écoute de cet album avec un système de son haute fidélité ou encore de très bons écouteurs doit être carrément jouissif. 

HtDA nous emporte dans un univers hypnotique qui progresse de pièces plus atmosphériques et sombres vers leurs morceaux les plus accessibles. Cette transition audacieuse (habituellement les pièces plus susceptibles d’accrocher l’auditeur se trouvent au début) donne une tout autre saveur à ces dernières. Lorsque l'inquiétante When the Sky Began to Scream et l’apaisante On the Wing enveloppent nos sens dans une ambiance voilée de mystère, les refrains soudainement épiques des Too Late, All Gone et How Long? dotent l’album d’une puissance inattendue. Ces pièces seules, sans cette mise en scène, n’ont pas du tout la même portée, malgré leur grande qualité. C’est à ce moment qu’on se rend compte que Welcome Oblivion est plus conceptuel qu’il n’y paraît. La clôture est particulièrement réussie grâce à Hallowed Ground, une pièce vaporeuse de plus de 7 minutes, hypnotique, qui amène l’auditeur vers une forme de zénitude complète. 



Je vous propose la pièce titre en écoute.

samedi 16 novembre 2013

30 jours, 1 chanson par jour

Jour 1: The Naked and Famous


Vous me direz qu'il est encore trop tôt pour faire une revue musicale de l'année 2013 et je vous répondrai que vous avez raison. Peu m'importe, nous sommes dans un pays libre! Sauf, évidemment, si vous êtes journaliste de la colline parlementaire ou scientifique (partout au pays), mais ne nous éloignons pas. Je ne sais pas pour vous, mais mon année 2013 a été musicalement riche. J'aimerais vous faire part de ce qui a résonné dans mes écouteurs tout au long de l'année, accompagnant mes peines, mes joies, mes frustrations et ma vaisselle. Commençons sans plus tarder avec une première minicritique!



The Naked and Famous
Album : In Rolling Waves
Sortie : septembre 2013
Étiquette: Universal

Ce groupe originaire de la Nouvelle-Zélande a connu un bon succès avec le premier album Passive Agressive qui comprenait les titres Punching in a Dream et Young Blood que l'on a pu entendre notamment dans certaines productions HBO. Le groupe revient avec un album qui me semble posséder une identité nettement plus ciblée, moins confuse que le précédent. In Rolling Waves reste cependant fortement ancré dans une dynamique sonore influencée par les années 90, empruntant parfois au rock d'arène et divers artistes influents de l'époque. 

La formule de The Naked and Famous repose sur des éléments rock, parfois presque hymniques, amalgamés à une forte présence synthétique. Ainsi, la guitare, souvent elle-même électroniquement modifiée, rappelle les frasques de Billy Corgan à l’aube du nouveau millénaire sans toutefois avoir cette prétention de réinventer quoi que ce soit qui lui était propre. Ce qui me plaît particulièrement sur cet album est le soin apporté à la production. L’album sonne comme une tonne de briques, en bonne partie grâce à la batterie qui n’est pas reléguée au simple rôle d’accompagnatrice en arrière-plan. Au contraire, le groupe s’amuse souvent à créer des crescendos, introduisant d’abord un rythme électronique subtil pour qu’au moment où la batterie acoustique joint l’ensemble, elle contraste de manière percutante avec son homologue synthétique. 

Dans l’extrait que je vous propose, la chanteuse Alisa Xayalith et son collègue Thom Powers s’échangent des paroles remplies de symboliques typiquement adolescentes, laissant entrevoir une relation amoureuse difficile. Le groupe emprunte (vole?) un élément musical de la chanson Leave de R.E.M. que l’on retrouvait dans la comédie romantique de Danny Boyle, A Life Less Ordinary à un moment charnière où les protagonistes n’ont plus le loisir d’ignorer leurs sentiments. Coïncidence ou choix délibéré? Je vous laisse juger par vous-même. Bonne écoute!

J'ai trouvé la chanson sur ce site qui me semble Russe et louche (je crois que ça va de pair!) CLIQUE 

vendredi 15 novembre 2013

Bienvenue !!

Bonjour à toutes et à tous!
La plupart d'entre vous connaissent déjà mon premier blogue: Chroniques d'un hypertendu où je partage mes réflexions intimes concernant la maladie et son influence sur l'identité. Les billets qui y paraissent sont souvent le résultat synthétisé de longues réflexions, ce qui explique une fréquence de publication instable. 

J'avais besoin d'un nouvel espace d'expression, plus ludique, où je peux expérimenter de nouvelles choses, ou je peux partager mes goûts artistiques, où il est possible de créer et imaginer. Je ne sais pas avec certitude quelle direction prendra Histoires d'un hypotendu, mais j'espère être en mesure de vous divertir et vous faire découvrir de nouveaux univers. 

Bienvenue et bonne lecture (ou écoute, ou visionnement, ou...)

Philippe Ouaknine
Hypertendu en attente d'un rein et Hypotendu qui s'attend à rien